WTA - Gibbs et Marino évoquent la dépression dans le tennis
Par François-Xavier PIPART le 19/03/2018 à 16:15
Rebecca Marino. Ce nom ne vous est probablement pas familier dans le monde du tennis. Joueuse professionnelle pendant un temps, elle a atteint la 38e place mondiale en 2011 et joué une finale d'un tournoi WTA (Memphis) avant de prendre une retraite anticipée à l'âge de 22 ans, victime d'une dépression. Dans une interview pour Tennis Chanel, la Canadienne raconte le calvaire que sa carrière professionnelle a été pour elle, mais aussi comment elle s'est reconstruite par la suite. 5 ans plus tard, début 2018, Rebecca Marino est de retour sur le circuit, plus solide mentalement et avec la ferme envie de terminer une carrière inachevée.
"Le tennis peut être un sport très sociable des fois, mais ça peut être aussi un sport où tu te sens seul(e). Quand les choses deviennent sérieuses, le tennis t'isole de plus en plus. C'est probablement au moment où j'ai obtenu mon meilleur classement, 38e, que je me suis sentie la plus triste, pas sur le plan professionnel bien-sûr, mais sur le plan personnel. J'avais l'impression que le monde s'écroulait autour de moi. Plus je restais éloignée de ma famille et de mes amis et plus ils me manquaient. Je crois que je n'étais vraiment pas préparée à ce qui m'attendait. Je savais que je n'avais pas simplement le mal du pays. Durant les entraînements, il m'arrivait souvent de fondre en larmes et j'ai déjà eu des pensées suicidaires." Face à cette dépression profonde, Rebecca Marino n'a trouvé qu'une solution : se retirer du monde professionnel.
"Après avoir pris ma retraite, je n'ai pas touché ma raquette pendant un an et je n'imaginais pas un seul instant de rejouer un jour au tennis. J'ai commencé à travailler avec un psychologue. J'ai posé ma candidature pour l'université de la Colombie-Britannique, où j'ai ensuite étudié pour obtenir ma licence en littérature anglaise. Là-bas, j'ai aussi rejoint l'équipe d'aviron. Etre dans cette équipe m'a aidée à comprendre ce que c'était que de faire partie d'une équipe, que lorsqu'il y a une faute, il n'y a pas qu'une seule personne à blamer mais tout le monde et que si l'on gagne, on partage cette victoire ensemble. Je pense qu'avoir cette routine d'aller en cours tous les jours, pratiquer un sport différent et voir ma famille quasiment tous les jours m'a aidé à remettre les choses en perspective et à comprendre que les gens m'aimaient pour qui je suis et non pas pour mes accomplissements."
"J'ai recommencé à taper un peu la balle et j'ai compris que je préférais largement jouer que coacher. A partir de septembre, j'ai commencé à vraiment m'entraîner. 2018 est une nouvelle année, un nouveau départ pour moi."
Un retour qui s'avère payant pour le moment, puisqu'elle a déjà remporté 3 tournois ITF d'affilée, soit 20 victoires consécutives, et pointe aujourd'hui à la 628e place mondiale.
Mais Rebecca Marino n'est pas un cas à part dans le monde du tennis. D'autres joueuses ont pu souffrir d'une dépression. A commencer par l'Américaine Nicole Gibbs, qui parle ouvertement des problèmes psychologiques qu'elle rencontre en jouant au tennis dans une interview au Telegraph. Pour elle, "si quelqu'un est proche de la dépression, le tennis va l'amplifier, sans aucun doute". "Quand vous êtes dans le top 50, le tennis est une crise d'identité constante" ajoute t-elle. "Tu te demandes tout le temps : qu'est ce que je peux mieux faire ? Est-ce que je fais vraiment tout ce que je peux ? [...] Il y a des moments où les hauts et les bas du tennis m'ont rendu la vie insupportable."